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18e siècle

Couple d’amoureux dans un jardin à l’anglaise auprès d’une statue du « Cupidon menaçant » de Falconet

TRINQUESSE Louis-Roland

Paris, 1746 - Paris, vers 1800

Couple d’amoureux dans un jardin à l’anglaise auprès d’une statue du « Cupidon menaçant » de Falconet

Huile sur toile

120 x 97 cm. (ovale)

Legs de la Comtesse Aimée-Adélaïde de Trobriand en 1895, récupéré au Lycée de jeunes filles en 1924.

Inv. : 1924-1-37

Notice complète

Elève de l’école de l’Académie Royale, Louis-Roland Trinquesse se présentera deux fois pour être agréé sans succès. Il a été souvent souligné que, malgré une œuvre très abondante, les années de formation de Trinquesse présentent de larges incertitudes et sans doute certaines confusions, on sait en revanche qu’il ne devint pas membre de l’Académie. Ne pouvant exposer au Salon, il présenta abondamment et très régulièrement ses œuvres au Salon de la Correspondance, la première fois en 1779 et jusqu’en 1787, puis pendant les années révolutionnaires, en 1791 et 1793, le Salon n’étant plus réservé aux seuls académiciens il put y participer. L’artiste, qui s’illustre essentiellement dans le genre du portrait et de la scène de genre, obtiendra un beau succès auprès de ses contemporains. La critique évoque devant ses tableaux la « facilité de son pinceau » et « les vérités dans les étoffes » (Salon de la Correspondance de 1783) et note le côté « piquant » de certaines scènes galantes (Salon de la Correspondance de 1785). L’œuvre dessiné de Trinquesse est particulièrement riche, ce « crayonneur à la sanguine » comme le surnomme Edmond de Goncourt représente le plus souvent des jeunes filles dans leurs activités quotidiennes, s’attachant plus à la description méticuleuse des costumes ou des coiffures qu’à l’expression des sentiments. Il fait en revanche preuve d’études psychologiques franches et sincères dans ses portraits d’hommes et d’enfants, Portrait de jeune garçon, 1777 (Amiens, musée de Picardie), Portrait d’homme, 1778 (Dijon, musée des Beaux-Arts).

Couple d’amoureux dans un jardin à l’anglaise auprès d’une statue du « Cupidon menaçant » de Falconet

Cette scène qui représente un couple d’amoureux se faisant quelques serments sous le regard complice d’un « Amour menaçant » est caractéristique et même redondante dans l’œuvre de Louis-Roland Trinquesse. Le sujet de ce tableau est assez mièvre, mais l’œuvre en revanche développe de belles valeurs décoratives. On est amusé par le jeu du triple regard dans cette composition, celui des jeunes gens et celui de l’Amour, sculpture qui s’inspire de L’Amour menaçant de Falconet (Paris, musée du Louvre), réalisé pour Madame de Pompadour et qui obtint un grand succès au Salon de 1757. La popularité de cette composition fut immense au XVIIIe siècle, on la retrouve ornant nombre de peintures, aquarelles et gravures. Suivant l’exemple de Fragonard qui empruntera cette sculpture en la transposant en statue de jardin dans Les Hasards heureux de l’escarpolette, 1767 (Londres, Wallace collection) Trinquesse la place dans un sous-bois. Il utilise avec malice cette sculpture qui échange un regard de connivence avec le spectateur l’invitant à s’immiscer en silence et avec complicité dans cette scène d’intimité.

Jean de Cayeux (marchand d'art, spécialiste de la peinture française du XVIIIe s.) a pensé reconnaître dans cette jeune femme l’un des modèles favoris de Trinquesse, Marianne Franmery. Si l’artiste la dessina de nombreuses fois, le tableau de Tours semble être l’unique peinture la représentant. Trinquesse s’attache dans ce tableau à peindre avec virtuosité les effets de drapés du taffetas de la robe de la jeune femme, les plis du tissu aux reflets argentés scintillent sous l’effet de la lumière et captent le regard. L’artiste prouve ici une fois encore qu’il possède une maîtrise étonnante pour représenter de manière tactile les étoffes, il sait merveilleusement casser les plis du satin, montrer la douceur de la soie, le moelleux d’un velours.

Contrairement à de nombreux tableaux de Trinquesse, cette œuvre n’est pas datée. Cependant les analogies étroites qui existent entre ce couple d’amoureux et deux tableaux peints en 1786, L’Offrande à Vénus (Dijon, musée des Beaux-Arts) et Les Adieux (collection particulière) permettent de situer sa réalisation autour de cette date. Ce tableau pourrait être celui exposé au Salon de 1793, sous le titre L’Entretien sentimental dans un parc, le sujet et les dimensions indiquées 4 pieds de haut sur 3 pieds de large correspondant à celles de cette œuvre.

Texte extrait du catalogue raisonné Peintures françaises du XVIIIe s. Musée des Beaux-Arts de Tours / Château d'Azay-le-Ferron, par Sophie Join-Lambert

Silvana Editoriale, 2008