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14-16e siècle

Artémis buvant les cendres de Mausole

CONEGLIANO Cima da (entourage de)

1469/1470 – 1517/1518

Artémis buvant les cendres de Mausole

Bois

H. 61,4 cm L. 26,5 cm.

Attribué au musée du Louvre M.N.R. 259 et M.N.R. 260, par l'Office des biens privés en 1950; déposés au musée des Beaux-Arts de Tours en 1952.

Inv. D.1953-2-3 et D. 53-2-4

Notice complète

Les Funérailles de Marcus Plautius et Orestilla

Artémis buvant les cendres de Mausole

Les deux peintures, panneaux de Cassoni (coffre de mariage) ont été déposées au musée des Beaux-Arts de Tours en 1952 par le musée du Louvre comme des œuvres vénitiennes peintes autour de 1500. En 1957 a été proposée une prudente attribution à l'entourage de Cima da Conegliano puis résolument donnée à cet artiste en 1961. Bien que la référence à l'atelier de Cima da Conegliano ait été confirmée également par Sylvie Béguin en 1980, des avis contraires ont été formulés par les spécialistes dès 1962 (œuvres de Giolfino, de Bernardo Parenzano...)

L'identification des deux sujets n'est pas évidente : "scènes mythologiques" ou de "scènes chevaleresques", un épisode du Décaméron de Boccace, épisodes de l'histoire de Pyrame et Thisbé... En tout cas, le contexte et la destination probable du coffre laissent supposer des thèmes de fidélité conjugale héroïque et il semble que les éléments de l'histoire s'accordent assez bien avec les moments culminants de la légende de Marcus Plautius et d'Artémise du chapitre, intitulée justement "De amore coniugali", des Factorum et dictorum memorabilium de Valère Maxime. Cicéron (Tusculanes, III, 31) et Aulu-Gelle (Nuits attiques, X, 18) racontent aussi l'histoire d'Artémise, reine de Carie, qui après avoir fait incinérer le corps de son mari Mausole, en avait bu les cendres. A l'arrière-plan du panneau on aperçoit, en effet, le bûcher funéraire d'où semble venir le jeune homme qui, représenté en deux moments successifs du récit, tend la coupe à l'héroïne.

Beaucoup moins connu est, en revanche, le thème de fidélité masculine qui sert de pendant. Le protagoniste en est le Romain Marcus Plautius qui, revenant d'Asie avec sa flotte, lors d'un arrêt à Tarente, ne peut résister au chagrin causé par la mort d'Orestilla, son épouse qui l'avait accompagné et se tue, alors que le corps de sa femme gisait déjà sur le bûcher funéraire. La scène représentée devrait être celle qui suit immédiatement, lorsqu'on transporte le corps de Plautius sur le bûcher, pour qu'il repose aux côtés de son épouse. Conformément au récit, la flotte est visible à l'arrière-plan et les acteurs de l'histoire sont représentés en centurions romains. Est également ici caractéristique de la culture antiquaire à Venise à la fin du XVe siècle l'ancienne ville gréco-romaine imaginée comme une colonie vénitienne en Orient, qui se retrouve dans d'autres peintures de Cima da Conegliano dont ces deux panneaux s'inspirent.

La faible qualité des deux panneaux de Tours exclut, de prime abord, leur caractère autographe mais la culture artistique dont ils sont l'expression est strictement liée à l'entourage de Cima da Conegliano. Leur répertoire formel et leurs caractéristiques stylistiques reprennent des modèles de Cima da Conegliano diffusés par le peintre au début du XVIe siècle. La présence de quelques éléments vaguement frioulans dans les architectures qui encadrent les deux épisodes incite à avancer prudemment le nom de Girolamo da Udine, un artiste encore peu connu, auteur d'une seule peinture signée, la Pala du Duomo d'Udine, représentant Le Couronnement de la Vierge et qui est aujourd'hui conservée au Museo Civico de la ville.


©MBA Tours, cliché Marc Jeanneteau