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18e siècle

Portrait de Hiérosme d’Argouges de Rânes

LARGILLIERE Nicolas de

Paris, 1656 - Paris, 1746

Portrait de Hiérosme d’Argouges de Rânes

Huile sur toile

80,5 x 63,5 cm.

Legs André Foulon de Vaulx, 1952

Inv. : 1952-1-6

Notice complète

Formé à Anvers dans l’atelier d’Antoine Goubeau, qui lui enseigne l’étude d’après nature, Nicolas de Largillierre restera durant toute sa carrière, fidèle à ses préceptes. En 1673 il se rend en Angleterre où il travaille comme assistant dans l’atelier du portraitiste Peter Lely pendant près de sept ans. Il est agréé à l’Académie Royale dès son retour en France en 1683 et sera reçu trois ans plus tard « peintre de portraits et d’histoire » sur présentation du Portrait de Charles Le Brun (Paris, musée du Louvre). Dezallier d’Argenville dans la notice qu’il consacre à l’artiste écrit : « le génie de cet homme rare s’étendait à tout» Largillierre en effet, même si le portrait est de loin le genre qui domine une immense production de près de 1500 œuvres, réalise également des natures mortes, des tableaux d’histoire et quelques paysages. Il est avec Rigaud le portraitiste le plus brillant de la fin du XVIIe et du début du XVIIIe siècle. Rigaud cependant est le portraitiste officiel de la Cour, Largillierre travaille essentiellement pour une riche clientèle bourgeoise. Son œuvre illustre avec éclat la haute société française sous les règnes de Louis XIV et Louis XV, par un sens exceptionnel de l’observation il a su rendre, parfois sans complaisance, l’individualité des visages et la psychologie des personnages.

Portrait de Hiérosme d’Argouges de Rânes

Ce portrait est entré dans les collections du musée en 1952 avec le legs Foulon de Vaulx, comme œuvre de Nicolas de Largillierre, attribution confirmée quelques années plus tard. Il faut très certainement reconnaître dans ce portrait d’échevin celui de Hierosme d’Argouges de Rânes, exposé en 1928 au Petit-Palais sous cette mention et qui appartenait déjà à cette date à la collection Foulon de Vaulx. Les dimensions indiquées dans le catalogue (108 x 87) correspondent exactement à celles de ce portrait avec son cadre et la notice du catalogue de l’exposition de 1928 précise que la toile est ovale.

Hierosme d’Argouges de Rânes, avocat, conseiller au Parlement en 1704 puis maître des requêtes en 1710, a été nommé quatre ans plus tard Lieutenant civil au Châtelet de Paris. C’est alors qu’il occupe cette fonction que Nicolas de Largillierre réalise un second portrait d’Argouges de Rânes (non localisé) mais présenté également à l’exposition consacrée à Largillierre à Paris en 1928, et qui appartenait à cette date aux descendants de l’ancien échevin (collection du marquis d'Argouges de Rânes). Ce portrait sera largement diffusé par l’estampe gravée par Petit. La confrontation du portrait conservé à Tours avec cette estampe permet de confirmer l’identification de notre personnage.

Les échevins de Paris commanderont très régulièrement leur portrait à Largillierre ; portraits collectifs ou portrait individuels d’échevins jalonnent l’œuvre de l’artiste. Trois ans seulement après que Nicolas de Largillierre ait été reçu à l’Académie Royale, l’Hôtel de Ville de Paris lui confie l’exécution d’un premier tableau représentant Le prévôt des marchands et les échevins de la ville de Paris commémorant le repas offert à Louis XIV le 30 janvier 1687, tableau perdu mais dont le souvenir est conservé par l’existence d’un ricordo (réplique) au musée de l’Ermitage et par deux esquisses. D’autres commandes suivront, mais l’on se doit de mentionner l’un des chefs d’œuvre de Largillierre peint en 1696 : Le Prévôt et les échevins de la ville de Paris remerciant Dieu qui les a délivrés de la sécheresse, ou Ex-Voto à sainte Geneviève (église Saint-Etienne du Mont). Cette œuvre éclatante de brio, est la seule encore subsistante des cinq grands portraits collectifs d’échevins commandés par l’Hôtel de Ville de Paris à Nicolas de Largillierre.

Le renouvellement permanent du corps des échevins justifiait la commande fréquente et régulière de nouveaux portraits, nécessaires pour réactualiser le décor des salles de l’Hôtel de Ville. Il était de tradition que les artistes qui devaient réaliser un portrait collectif offrent à chacun des échevins représentés sur cette composition son portrait individuel. Ces œuvres sont le plus souvent conservées encore aujourd’hui chez les descendants des anciens échevins.

Sur le portrait de Tours, Hierosme d’Argouges de Rânes, porte le costume des échevins composé d’une robe de palais de velours rouge et violine ouverte sur une soutane noire dont le col est fermé par un rabat de linon blanc. Le visage rougeaud encadré par l’épaisse perruque blanche a été représenté avec un réalisme extrême et sans complaisance par Largillierre. L’artiste a utilisé pour cette œuvre un cadrage plus resserré et une palette plus froide que pour certains autres portraits d’échevins que l’on peut comparer avec celui-ci, notammentle Portrait d’Hugues Desnotz, 1704 (Paris, musée du Louvre), celui de Charles Boucher d’Orsay (Paris, musée Carnavalet) ou encore le Portrait d’un échevin, 1723 (Mâcon, musée des Ursulines).

Texte extrait du catalogue raisonné Peintures françaises du XVIIIe s. Musée des Beaux-Arts de Tours / Château d'Azay-le-Ferron, par Sophie Join-Lambert

Silvana Editoriale, 2008