UA-10909707-12

> > > 18e siècle

18e siècle

Pygmalion voyant sa statue animée

LEMOYNE François

Paris, 1688 - Paris, 1737

Pygmalion voyant sa statue animée

Huile sur toile

212 x 168 cm.

Don de M. Georges Jay-Gould , 1951

Inv. : 1951-5-1

Notice complète

Elève de Louis Galloche, François Lemoyne obtient le Grand Prix en 1711. Agréé à l’Académie Royale en 1716 il est reçu comme peintre d’Histoire deux ans plus tard sur présentation d’Hercule et Cacus, (Paris, E.N.S.B.A.). Si ses premières œuvres, traitées dans des tonalités chaudes, témoignent de l’influence des leçons de Galloche, sa rencontre avec Sebastiano Ricci de passage à Paris, ainsi que celle d’Antonio Pellegrini auprès de qui il travaille puis enfin un séjour à Rome et à Venise en 1723 et 1724, vont orienter Lemoyne vers un coloris plus clair. Durant ce voyage en Italie effectué en compagnie de son protecteur François Berger il termine la réalisation d’Hercule et Omphale (Paris, musée du Louvre). Dès son retour à Paris, Lemoyne réalise de grandes compositions pour les églises parisiennes, introduisant dans ses œuvres une luminosité nouvelle (La Transfiguration pour Saint Thomas d’Aquin, coupole de la chapelle de la Vierge à Saint-Sulpice) et travaille également pour différents édifices versaillais, l’Hôtel du Grand Maître, la cathédrale Saint-Louis.

La plus brillante de ses réalisations est le plafond pour le salon d’Hercule à Versailles, immense peinture narrative qui lui vaudra d’être nommé premier peintre du Roi.

Sa peinture claire, sensuelle, élégante allait marquer de manière radicale la peinture française après 1730, et influencer durablement deux de ses meilleurs élèves, François Boucher et Charles Natoire.

Pygmalion voyant sa statue animée

Il n’a pas encore été possible d’identifier avec certitude le commanditaire de ce grand tableau qui fait cependant partie des plus célèbres réalisations de François Lemoyne. L’on sait néanmoins que l’œuvre appartenait à Jean-Joseph de La Borde avant 1762. Donnat Nonnotte, dans le manuscrit qu’il consacre à son maître François Lemoyne, mentionne chez La Borde un tableau qui est vraisemblablement celui conservé aujourd’hui à Tours : « 11 - Tancrède et Clorinde pour M. Berger, receveur général des finances, aujourd’hui chez M. de La Borde, banquier du roi. 12 – Dans le même cabinet est le Pygmalion du même auteur » (2). Le Pygmalion et Galatée est ensuite mentionné à plusieurs reprises dans différents catalogues de vente. L’œuvre a ensuite suivi jusqu’en 1811 le même parcours que cet ensemble de tableaux de Lemoyne provenant de la collection Bouvet. A partir de 1811, ce « lot » est dispersé dans différentes collections et George Jay-Gould, collectionneur de peintures anciennes et impressionnistes, achète Pygmalion et Galatée en 1931. Il le fera ensuite transporter au château du Sentier, à quelques kilomètres d’Amboise (37, Indre-et-Loire), acquis par son épouse en 1938. Cet américain séjournait fréquemment en Touraine, mais il rejoint les Etats-Unis pendant la guerre et ne rentrera en France qu’en 1950. Un an plus tard, il offre au musée de Tours cette œuvre qui venait ainsi compléter somptueusement la collection des peintures françaises du XVIIIe siècle.

Ce mythe de Pygmalion et Galatée, sorte de métaphore de la création, connut une véritable vogue tout au long du XVIIIe siècle. On a souvent souligné les rapports étroits existant entre ce tableau de Lemoyne et le morceau de réception de même sujet présenté à l’Académie royale par Jean Raoux en 1717 (Montpellier, musée Fabre). En effet, François Lemoyne, de toute évidence, se souvenait lorsqu’il a peint son Pygmalion et Galatée de la composition de son aîné qui ornait la salle d’Assemblée de l’Académie lorsqu’il y était encore élève. Peut-être même connaissait-il le dessin de Jean Raoux (Toulouse, musée Paul Dupuy), plus proche encore par bien des détails de son Pygmalion. L’œuvre de Lemoyne se distingue cependant de celles de Raoux par un dynamisme vibrant qui offre à ce tableau une présence particulièrement forte. Le sculpteur bondit vers Galatée prenant vie et les multiples drapés suivent l’élan créé par la métamorphose de la « vierge d’ivoire » d’Ovide, le rythme de l’œuvre semblant ainsi répondre au souffle de vie naissant. La matière onctueuse, généreuse, est travaillée avec une belle souplesse par l’artiste et accompagne avec bonheur le mouvement de la composition. Les réminiscences vénitiennes sont, comme sur de nombreuses œuvres de l’artiste, perceptibles notamment dans le choix de la palette mais aussi dans la représentation de Galatée.

Texte extrait du catalogue raisonné Peintures françaises du XVIIIe s. Musée des Beaux-Arts de Tours / Château d'Azay-le-Ferron, par Sophie Join-Lambert

Silvana Editoriale, 2008