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Arts graphiques

Vue de Tours, chef-lieu du département d'Indre-et-Loire (1810)

MELLING Antoine-Ignace

Karlsruhe, 1763 - Paris, 1831

Vue de Tours, chef-lieu du département d'Indre-et-Loire (1810)

Aquarelle sur papier

H. 84 cm L. 115 cm

Acquis en 1990

Inv. 1990-5-1

Notice complète

Melling fut formé à la sculpture par son père, artiste attaché à la cour de Bade, au dessin par son oncle, fondateur d'une école de dessin à Strasbourg, à l'architecture et aux mathématiques par son frère, professeur en Carinthie. Au terme d'un voyage dans le bassin de la Méditerranée, il se fixe à Constantinople et devient l'architecte d'Hadidgé, sœur du sultan Selim III. Rapatrié en 1803, il publie un recueil de vues, Voyage pittoresque de Constantinople et des rives du Bosphore. Peintre de Joséphine puis de Louis XVIII, il exécute plusieurs vues d'événements officiels.

Au cours d'un voyage en Val de Loire, il dessine les sources du Loiret, l'aqueduc romain à Blois, des paysages et des villes comme Orléans et Tours.


Melling a toujours eu à l'esprit de dessiner des vues de France : dès 1810, il propose d'exécuter celles de toutes les préfectures de l'Empire. Cette Vue de Tours, chef-lieu du Département d'Indre-et-Loire, qui a conservé son cadre d'origine, concrétise cette intention par le sujet même et son titre.

L'artiste s'y représente en bas à gauche, carton à dessin sous le bras, écoutant les commentaires de son hôte face au panorama.

Melling, dès son séjour à Constantinople, avait dessiné sur le motif avec un grand souci de l'exactitude de nombreux paysages, détails architecturaux, scènes de rue, voire détails de costumes et portraits. Il s'était livré à un minutieux travail d'esquisses, en notant toujours précisément le lieu où il posait son chevalet, mettant le plus souvent ses dessins au carreau, notant dimensions et coloris. Ici, il met son talent de vedutiste accompli au service d'une représentation de la ville de Tours, scrupuleusement fidèle au motif.

Ce large panorama fut probablement exécuté depuis une fenêtre de la Galanderie (actuelle Villa Sainte Marie), sur la commune de Saint-Cyr-sur-Loire sur le coteau nord. Cette propriété du XVIIe siècle couvrait deux hectares et appartenait en 1810 à la famille Sorbière. Une belle demeure se dressait au sommet du coteau, précédée d'une large terrasse. La partie Est qui s'étend sous nos yeux, était le domaine des vignes. Sur ces terres, allant jusqu'à Saint-Symphorien, bien exposées, cultivées en vignobles en 1810, allaient s'installer par la suite les résidences secondaires de la haute société - le docteur Bretonneau vivra à proximité de la Galandrie, qui sera elle-même la demeure du docteur Tonnellé-, puis des maisons de repos, de soins ou de convalescence.

Ce panorama inspirera des peintres comme Cazin, qui vint travailler de 1869 à 1871 à la Grenadière (propriété voisine où séjourna Balzac en 1830) et à la fin du XIXe siècle nombre de photographes.

Au premier plan, les vignobles représentent le futur emplacement du couvent de la Grande Bretèche. La transcription des bâtiments et des détails de la vie locale est d'une fidélité extrême. Sur la rive nord sont visibles : octrois de l'entrée du pont, sur lequel s'avance un carrosse, couvent des Capucins, maison Saint-Roch, abbaye de Marmoutier, les trois arches de l'ancien pont gothique et gabares sur la Loire. Côté sud, place des Arts à l'entrée du pont, bordée de l'hôtel de ville et du futur musée, inauguré en 1828; verger et abbaye de Saint-Julien, couvent de Jacobins, terrasses et jardins des Carmélites, ancienne église Saint-Saturnin, poissonnerie du XVIIe siècle, enceinte du XIVe siècle de Jean le Bon, enfin tour Charlemagne et du Trésor de la basilique Saint-Martin. A l'arrière-plan, le coteau du Cher apparaît tout en nuances, en horizon à peine ondulé, alors que ses prédécesseurs en firent souvent une ligne de falaises.

Le point de vue élevé, l'ouverture panoramique, l'importance accordée à l'eau et au ciel, les nuances bleutés, redevables des écoles nordiques du paysage, mais aussi une savante luminosité et un traitement de l'atmosphère propre au paysage décrit, sont encore autant de traits caractéristiques de l'art de Melling.

© MBA Tours, cliché Patrick Boyer