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Pierre noire, estompe et rehauts de craie blanche sur papier vergé bis, mise au carreau à la pierre noire
H. 52,9 cm L. 37 cm
Don Aline Vinchon, 1922
Inv. 1922-306-2
Né en 1748 à Paris, Jacques-Louis David restera hanté par la mort de son père lorsqu'il avait neuf ans. François Boucher, parent lointain, introduit le jeune homme dans l'atelier de Vien, le rénovateur de l'école française. David fréquente les salons littéraires, découvre les idéaux des Lumières et l'esthétique de l'utopie. Il suit les classes communes et obtient le prix de Rome en 1774, après trois échecs, dont l'un qui le conduisit au bord du suicide, s'explique par une cabale significative de l'évolution de l'Académie vers un autoritarisme étouffant.
La révélation de l'art italien est un choc. A Rome, David rejoint le mouvement néo-antique de Peyron, Giraud, Quatremère de Quincy et mesure la portée de l'esthétique idéaliste prônée par Mengs et Winkelmann. Afin d'exposer au Salon, il est agréé à l'Académie avec Bélisaire reconnu par un soldat (1781), pourtant conçu comme une critique des abus de la monarchie. Dans son morceau de réception à l'Académie, La Douleur ou les Regrets d’Andromaque (1783), la souffrance prime sur la mort du héros. Première commande royale, David repart à Rome peindre dans une atmosphère antique Le serments des Horaces (1784). Manifeste accompli de la nouvelle école, l'œuvre dénonce l'hypocrisie d'une société corrompue.
Trois ans après Le Serment des Horaces (1784-1785), David puise à nouveau dans le répertoire antique pour réaliser un tableau de grande dimension. La Mort de Socrate, commande de Charles-Michel Trudaine de la Sablière, est présenté au Salon de 1787 et suscite un enthousiasme extraordinaire de la critique, comprise comme un "triomphe de la philosophie" et en 1789, Les Licteurs rapportent à Brutus le corps de ses fils comme un "sujet grave et noble" et "un exemple de vertu".
Étude pour 'La mort de Socarte"
Dans cette étude, David représente Platon, disciple de Socrate, pourtant absent lors de la mort de ce dernier, assis au pied du lit du philosophe qui s’apprête à boire la cigüe. Derrière lui, dans une posture exprimant l’accablement, se tient un jeune homme dont le bas du corps dénudé a été laissé visible.
L'ensemble des grandes études de draperies pour chacun des personnages de La Mort de Socrate nous est parvenu presque intégralement, les études connues pour la figure de Platon se trouvant aux musées de Bayonne, Dijon (musée Magnin) et Tours. Le Louvre conserve une étude "sur nature" d'après le modèle drapé, considérée comme la première amorce de l'attitude de Platon.
Dans la composition définitive, tandis que les disciples manifestent un pathos intériorisé mais tout humain, participant de l'univers dramatique replié sur lui-même que David développe dans ses peintures des années 1780, Socrate semble désigner par son geste vers le ciel un principe supérieur, une vérité absolue.
Dans l'étude du musée de Tours, réalisme et idéalisme se répondent de façon perceptible : si la posture du jeune homme exprime un accablement voire une désespérance retenus, l'attitude de Platon traduit une intense méditation sur la faillite d'une société. La tension qui se lit sur son visage est contrebalancée par la dimension de statue antique du personnage, par l'assise pyramidale, capitale, dans la composition définitive. Le drapé, traité ici en transparence, laissent apparaître l'esquisse anatomique du bas du corps du jeune homme, révélant ainsi toute la genèse du dessin. La figure de Platon devient emblématique de fondements nouveaux.