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Huile sur toile
200 x 176 cm.
Dépôt de l'Etat 1882, transfert de propriété de l'Etat à la Ville de Tours, 2010
Inv. 1884-1-1
Fils d’un bouchonnier originaire de Clermont-Ferrand, Émile Barau est, à 21 ans, marchand de bouchons à Reims. Profitant vraisemblablement de la mort de son père survenue en 1872 pour rompre avec le commerce familial, il entreprend des études artistiques. En 1874, il fréquente l’atelier de Gérôme à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, et se perfectionne avec le peintre autrichien Eugène Jettel. Formé à l’académie de Vienne, celui-ci arrive à Paris en 1866, où son art se modifie au contact de Corot, Dupré, Daubigny et Rousseau dont il a lui-même bénéficié, et entame en sa compagnie un voyage en Hollande en 1876.
Si Barau expose des paysages hollandais et danois aux Salons des artistes français de 1877 à 1881, ainsi que des vues de Bretagne, du Berry et de Touraine, ce sont surtout les sites de sa Champagne natale qui retiennent son attention. Jouissant d’une confortable aisance financière, il se consacre à l’exercice de la peinture et peu préoccupé de considérations économiques, choisit des sujets ingrats, parfois inspirés de l’austère campagne champenoise.
Plusieurs de ses œuvres sont achetées par l’Etat pour le musée du Luxembourg (Sur la Suippe, Salon de 1881) ou les musées de province (Blois, Tisserand en Champagne, 1892 ; Tours, Village des Roches, 1881). Fidèle aux artistes français jusqu’en 1889, il obtient une mention honorable en 1883 (Paysages des Islettes), une médaille d’or à l’Exposition universelle de 1889 avec deux panneaux intitulés le Matin et le Soir et, en 1895, il est chevalier de la Légion d’honneur.
En 1900, il participe à la décoration du Salon des Sciences à l’Hôtel de Ville de Paris, en compagnie de Rixens, Berton, Vauthier…
A partir de 1890, il est membre de la Société nationale des Beaux-Arts, dont il est secrétaire et où il expose jusqu’à sa mort.
Participant activement aux manifestations organisées par la Société des amis des arts de Reims, il est également bien introduit dans les milieux du Champagne. Il y bénéficie de l’attention d’amateurs fidèles qui se portent souvent acquéreurs de ses toiles. Grâce au legs de l’un d’entre eux, le musée de Reims conserve le fonds public le plus important d’œuvres de Barau (1907, legs d’Henri Vasnier, douze peintures).
Village des Roches :
Bien qu’acheté au Salon de 1882, retenu pour les expositions de province à l’égal d’autres œuvres acquises par l’Etat, le tableau n’arrive au musée qu’à la fin de l’année 1883. L’attribution de cette toile à Tours est vraisemblablement décidée en raison de son sujet, le village des Roches, localité du Sud-Est de la Touraine, non loin de Montrichard.
La composition s’équilibre autour de la masse des arbres à gauche, à laquelle répond celle des constructions, à droite. L’élément architectural, généralement très présent dans les mises en scène de Barau, suggère cette remarque à Fourcauld dans sa critique du Salon de 1884 : « quatre ou cinq paysagistes soutiennent vaillamment l’honneur de leur art […]. Je nommerai donc […] M. Barau, chercheur d’impression qu’attendrit la vue d’un clocher de village… » L’artiste utilise ici un cadrage qui lui est familier, accordant une place importante au ciel et dégageant les premiers plans. Il guide le regard du spectateur vers le fond de la scène au moyen d’une route sinueuse dont la tonalité claire prolonge celle du ciel, traité dans une gamme de jaunes soufrés. Ce chemin en perspective, la gamme de verts clairs, d’ocres pâles et de gris nacrés manifestent encore l’influence de Jettel, qui appréciait les ciels plombés et les terrains glaiseux étudiés au cours de leur premier voyage en hollande. La facture ample avec laquelle le peintre traite l’ensemble de l’œuvre, et la touche généreuse qu’il emploie pour les premiers plans, témoignent des recherches menées par de nombreux paysagistes à la fin du siècle.
Comme français ou Harpignies, Barau tente de réaliser la synthèse entre la vision des adeptes de Fontainebleau et celle des jeunes impressionnistes sans toutefois parvenir, sous une rudesse apparente, à suggérer le sentiment du plein air.